A voix lasse
Un soir d’été, sous la vigne menue
Je veillais de loin, comme si de rien
N’était. Le jour s’éteint
Dans nos étreintes nues.
Le sommeil tue jusqu’à l’aurore.
J’ai beau t’aimer, tu dors.
Un instant, beau guerrier, j’ai vu un air amer
Passer sur ton front pâli,
Tu affrontais des rêves pleins de chimères
Et de monstres assoupis.
Je te regarde dormir, il est tard encor
Tu n’es pas si fort quand tu dors.
L’aube est loin, mon amour ! La chaleur du jour
Viendra. Mais la nuit blême se fait sauvage,
Tu luttes avec rage.
Le noir laisse tomber son bras lourd :
L’on te déchire, l’on te tue,
Tu luttes, tu luttes, tu luttes toujours !
Et puis la nuit s’allonge ; à quoi rêves-tu ?
A la vie idéale qui couronne ta tête
De baisers, de roses, de vierges en fête ?
Puis, le réconfort des heures glacées :
L’aube est là. Les bras attendris du matin
T’entourent comme les miens.
Toi ? Tu te réveilles comme si de rien
N’était. Tu demeures le plus aimé.
Je pleure à voix basse, je t’aime à voix lasse.